La discrimination basée sur le genre en matière d’accès à la propriété foncière au Burundi est un fait établi. Les filles célibataires et femmes divorcées partagent équitablement avec leurs frères mais cette succession est en usufruit. La succession en usufruit ne permet pas à son propriétaire d’en réjouir convenablement. La fille ou la femme ne peut pas la placer à la banque sous forme d’hypothèque.

Selon Dr. Alexis Manirakiza , enseignant dans la faculté de Droit, à l’Université du Burundi, plaider pour l’égal accès des femmes burundaises à la propriété foncière contribue au développement des stratégies juridiques en vue de lutter contre la discrimination basée sur le genre en matière d’accès à la propriété foncière au Burundi. Il explique qu’au Burundi, sur plus de 80% des propriétaires fonciers, plus de 60 % sont des hommes et seulement 17,7% sont des femmes selon le Recensement général de la population et de l’habitat de 2018, ( RGPH, 2008).
Pour lui, cette asymétrie est expliquée par le mode successoral qui est le principal mode d’accès à la propriété foncière au Burundi. Or, le droit successoral relève encore et toujours du droit coutumier. Les normes coutumières successorales, telles que interprétées par des juridictions burundaises consacrent, en grande partie, une discrimination basée sur le genre dans l’accès à la propriété foncière.
Les femmes n’ont pas droit aux crédits car elles ne possèdent pas de terre pour en utiliser comme hypothèque, s’indigne @manirakizaimabl . Les femmes ne jouissent pas le droit de propriété et elles ne jouissent que le droit d’usefruit en ce qu’on appelle “Igiseke”, explique-t-il pic.twitter.com/E9HGoddiof
— Urumuri News (@UrumuriN) July 25, 2022
Il a indiqué que si la succession porte sur des biens fonciers propres, qu’il n’y ait aucune discrimination basée sur le genre dans l’accès à la propriété. C’est un principe accepté. Cela concerne surtout les biens fonciers que l’on trouve en milieu urbain.
En revanche, si la succession porte sur des biens fonciers lignagers, la discrimination basée sur le genre ressurgit. Il s’agit ici surtout des biens fonciers situés en milieu rural.
Selon les tribunaux progressistes, (les tribunaux qui acceptent le changement) les femmes mariées ont droit au petit lopin de terre appelé « igiseke », succession en usufruit. Mais selon les tribunaux conservateurs, (les tribunaux qui restent dans le passé ) ces femmes et filles ne reçoivent rien.
Quant aux filles célibataires et femmes divorcées, le partage égal avec leurs frères mais, succession en usufruit
Si la succession porte sur des biens fonciers et que le conjoint survivant est une femme, son droit successoral est limité par rapport à celui de l’homme survivant dans la mesure où il prend toujours la forme d’un usufruit viager. Elle ne sera donc pas propriétaire.
Pour couper court à ce phénomène, le CDE, (Centre for development and entreprises Great Lakes ) dans son projet « why whoman » « pourquoi la femme » propose qu’il y ait l’adoption de la loi sur les successions.
L’accès à la propriété foncière pour les femmes, une nécessité économique

Le président du CDE Great Lakes, Aimable Manirakiza, a rappelé que le Burundi est un pays dont la grande partie de la population dépendent économiquement de l’agriculture. 90% de la population burundaise vit de l’agriculture de subsistance, et ce chiffre montre que 95% sont en milieu rural (RGPH, 2008). Il souligne que permettre aux femmes d’avoir accès à la propriété foncière c’est leur permettre d’être économiquement indépendantes.
Bien plus, l’accès à la propriété foncière en faveur des femmes permettrait d’augmenter leur inclusion financière dans la mesure où il leur sera facile d’obtenir des crédits, en mettant en garantie leur terre, ce qui n’est pas encore le cas.

C’est pour cette raison que le CDE Great Lakes, à travers son projet Why Women a publié en date du 25 Juillet 2022 , une autre série d’étude de recherche autour de la problématique du respect des droits de propriété devant les cours et tribunaux juridiques qui est la condition préalable et la plus fondamentale à la prospérité économique des femmes et filles burundaises.